vendredi 4 janvier 2013

Chronique : Les proies - Dans le harem de Khadafi [Annick Cojean]


Titre : Les proies - Dans le harem de Khadafi
Auteur : Annick Cojean 
Année  : 2012
Editeur : Grasset (version papier / version numérique)
Public visé :  Adultes


Quatrième de couverture :

C'est sans doute le dernier secret de Khadafi. Et le plus scandaleux. En novembre 2011, Annick Cojean publiait dans Le Monde un article terrifiant. Une jeune femme y racontait comment l'année de ses 15 ans, le Guide libyen la repérait dans son école, lui caressait les cheveux, et la désignait ainsi à ses gardes comme son esclave sexuelle à vie. Violée, battue, forcée par son maître à consommer avec lui alcool et cocaïne, et intégrée dans les troupes des «Amazones», elle ne pourra s'échapper de cet enfer que peu avant la Révolution. Une vie brisée.
 Une seule ? Non, des centaines, sans doute plus. Mais le sujet, en Libye, reste totalement tabou.
 Dans les coulisses d'une dictature, dans le lit d'un chef d'Etat drogué en permanence, tyran d'opérette mais vrai meurtrier, nous plongeons dans un système d'esclavagisme, entre corruption, terreur, viols, crimes. Un système aux complicités multiples, bien au-delà du seul territoire libyen.
 Pour recueillir l'incroyable histoire de la jeune Soraya et d'autres femmes révoltées, Annick Cojean a mené secrètement l'enquête à Tripoli, cette prison à ciel ouvert.


L'avis du lecteur :




J'ai eu l'occasion de voir une interview d'Annick Cojean pour un petit magazine après le JT d'une chaîne télé belge. J'ai été happée par ce qu'elle a raconté sur son livre et ça m'a donné envie de le lire.

Je l'ai dévoré.

Ce livre, je ne l'ai pas aimé. On ne peut pas vraiment dire qu'on aime ce genre de livre. Ce n'est pas un coup de coeur, non. C'est un coup de poing. En plein visage. Un aller-retour qui ne vous laisse pas indemne. On peut y lire l'impensable, l'insoutenable.

Adulés par beaucoup, craint par d'autres et détestées par celles que l'on nomme les amazones ou les filles de Khadafi. Quoique. Certaines, hélas, n'ont pas su sortir de ce carcan charismatique qu'on lui a souvent prêté. Il était un Guide pour beaucoup mais pour bon nombre d'entre elles, il était un bourreau. Leur bourreau et elles avaient beau vouloir fuir, elles revenaient car plus rien n'existait autour d'elles.

Le livre se construit en deux parties. La première expose le récit de vie de Soraya, l'une de ces femmes prises par Khadafi sous son aile sous des prétextes fallacieux. La seconde relate des témoignages qu'a pu glâner Annick Cojean au fil de ses investigations en Lybie et ailleurs. Les deux parties sont fort différentes l'une de l'autre mais pas sans intérêts. La seconde vient en quelque sorte étayer encore davantage le témoignage déjà très prenant de Soraya. Ils se font écho, ils sont la continuité de leurs histoires respectives. Des soeurs étrangères de sang mais pas de drames.

Ce qui est dramatique dans ce livre est le constat effarant de toute la machination, toute l'organisation mise en place pour assouvir les besoins les plus abjectes du dictateur. Surtout la manière dont il repérait ces filles (généralement très très jeunes) pour ensuite les rejeter comme de vulgaires mouchoirs (pour celles qui pouvaient encore espérer un avenir). Le plus surprenant sans doute est la question de l'honneur qui revient souvent dans le livre. L'honneur pour les lybiens est essentiel, parfois plus que la vie d'un membre de sa famille, surtout si c'est une femme.

Ce livre m'a bouleversée, chamboulée. J'ai dû m'empêcher de verser des larmes, surtout quand je le lisais à la pause au boulot tant les témoignages sont crus et criants de vérité. Le viol comme arme politique, comme outil de pression. Une arme destructrive, qui a ravagé bon nombre de femmes et détruit leur avenir.

L'épilogue d'Annick Cojean traduit bien ce qu'on ressent quand on finit cette lecture. Un malaise, une gêne, une rage, la colère qui vous noue le ventre et qui nous fait dire "mais comment peut-on laisser faire ça ? " Le tabou n'a pas de frontières. Le tabou est d'une puissance déloyale. Encore plus là-bas.


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